Interview

GPK : Lyazid Abid répond à nos questions

Nous avons envoyé quelques questions à monsieur Lyazid Abid, ministre de la Communication du GPK, qui a eu l’obligeance de nous répondre.

Toutefois nous signalons que les questions, ci-dessous, lui ont été envoyées dimanche 27 mars 2011. Le ministre du GPK étant très occupé, nous n’avons reçu les réponses à nos questions que vendredi 1er avril. Nous n’avons, malheureusement, pas pu rebondir par rapports aux réponses, puisque les questions ont été envoyées par mail.

Beaucoup de questions, des polémiques, des déclarations provenant de sources diverses charriant des informations contradictoires, et parfois graves, sur le GPK circulent actuellement sur le net. Pour tenter d’éclairer cette situation, nous avons voulu nous adresser directement au GPK pour lui fournir l’occasion d’apporter ses réponses aux nombreuses questions que les uns et les autres se posent à son sujet.

Lyazid Abid : Merci pour l’occasion fournie afin d’apporter des réponses à la polémique sur l’Anavad (GPK). D’abord, je tiens à rassurer nos militants, vos lecteurs et les amis de la Kabylie : l’Anavad se porte bien. Le travail continue dans la sérénité qu’exige sa mission. Quant à la polémique, aux déclarations diverses, aux débats qui circulent sur le net, inutile de rappeler que ce sont des signes de vitalité et de l’importance des sujets en question. Le peuple kabyle était, pendant très longtemps, privé de parole et à chaque fois qu’il tenta d’extérioriser sa pensée ou la beauté de sa culture, on l’accusa systématiquement d’atteinte grave aux fondamentaux de l’État algérien. Il a aussi, depuis la crise dite « berbériste » de 1949, jusqu’au printemps Noir 2001, trop souffert des stratégies politiques qui faisaient de lui un moyen et non une fin.

Avec le recul, on se dit que si on avait poussé plus loin la réflexion, lors des grands rendez-vous de notre histoire, peut être que le peuple kabyle serait déjà libre. C’est pour cela qu’aujourd’hui, les Kabyles, et ils ont parfaitement raison de le faire, osent poser les questions qui fâchent. Pour ne rien vous cacher, j’apprécie cet esprit vif et curieux de notre peuple. Cette réactivité reflète son esprit combattant et sa détermination à se débarrasser des réflexes qui nous empêchent d’atteindre notre liberté.

Vous êtes le ministre de la Communication du GPK qui vient d’être secoué par une crise qui s’est soldée par le départ de 5 membres du gouvernement sur 9. Quelle est votre appréciation de cette crise ? Partagez-vous le point de vue de votre président sur cette situation qu’il considère comme un simple resserrement de l’équipe gouvernementale ?

Absolument, d’ailleurs même les États normalement constitués sont souvent secoués par des crises qui se soldent par des limogeages et des démissions de ministres. L’Anavad (GPK), qui opère dans les conditions que vous connaissez, n’est pas imperméable à ce genre de crise. En ce moment même, il fait face à d’impitoyables attaques visant à le déstabiliser. Qui ne connait l’hostilité du régime algérien vis-à-vis de toutes initiatives provenant de Kabylie ? Sa brutalité, sa répression, son opacité montent d’un cran à chaque fois que la Kabylie revendique sa dignité. Les 5 ex-collègues auxquels vous faites allusion sont d’excellents ambassadeurs de la cause kabyle. Je garde un excellent souvenir des séances de travail que nous avons eues ensemble, lors des Conseil des ministres. Le défi que nous avons décidé de relever en rejoignant l’Anavad transcendait toutes nos divergences. Rappelons-nous, la qualité des hommes n’est pas forcément liée aux postes qu’ils occupent. On peut activer en dehors de l’Anavad et accomplir un remarquable travail. Après 6 mois d’exercice, il est évident que le président de l’Anavad, M. Ferhat Mehenni, tire des conclusions. Il y va de l’efficacité de son gouvernement. Il a, donc, jugé utile de resserrer l’équipe de l’Anavad. Cela ne remet pas du tout en cause les compétences de nos ex-ministres. Simplement, certains portefeuilles, tels l’économie, les finances l’intérieur, ne peuvent être opérationnels que le jour où la Kabylie sera réellement autonome.

Ayant pour protagonistes des ministres du GPK, une polémique fait rage. Elle porte sur plusieurs points ayant trait au financement du GPK. Commençons, si vous voulez, par l’affaire des 25.000€. S’agit-il d’un prêt ou d’une aide à la radio dirigée par Idir Djouder ? Y a-t-il des pièces écrites attestant de la nature de ce transfert de fonds ? Estimez-vous que ces fonds ont été utilisés à bon escient ?

À l’instar de tous les Kabyles, M. Ferhat Mehenni, aide, conseille, secoure les nécessiteux, sans distinction de couleur politique ou de classe sociale, à chaque fois que cela lui est possible. Il est évident qu’en tant que « Asselway Unavad », président de l’Avavad, il est de son devoir aussi de favoriser, d’aider et de contribuer à l’émergence d’outils susceptibles de rendre visible le combat kabyle. Il se trouve que Kabyle.fm, une radio qui émet sur le net, est la propriété de M. Idir Djouder ; un Kabyle au parcours militant respectable et connu de tous. Devenu ministre de l’Anavad, la question d’une aide financière pour pouvoir diffuser par satellite ne se posait même pas. Il est donc évident que l’argent en question a été alloué pour l’équipement de cette radio. Je ne comprends pas la dernière partie de votre question relative à l’existence d’une pièce écrite ; M. Idir Djouder n’a jamais renié la réception de cette aide. Je suis sûr, qu’à défaut d’accomplir les travaux prévus, il restituera cet argent.

On apprend toujours selon le même Idir Djouder, qui a occupé le poste de ministre des Finances, que tous les membres du gouvernement ainsi que les conseillers de Ferhat Mehenni sont salariés. Confirmez-vous le principe de cette rémunération et êtes-vous d’accord avec la fourchette avancée par Idir Djouder entre 2.000 et 4.500 euros mensuel et pouvez-vous nous la préciser ?

Pour mettre fin à cette polémique tous azimuts, je tiens à préciser deux choses. Primo, les neuf ministres choisis par le président de l’Anavad et installés le 1er juin 2010, n’ont d’autres intérêts que celui de voir la revendication kabyle triompher. C’est par esprit combattant que ces femmes et ses hommes se sont retrouvés dans l’Anavad. Secundo, la question d’argent qui taraude certains esprits souvent pervers en quête de scoops médiatiques, je vous rassure, est totalement erronée. Il est vrai qu’au début, le président, nous avait remis de quoi s’acheter ce qui est indispensable à notre mission de ministre, titres de voyage, ordinateur, frais de déplacement, etc. Depuis la deuxième réunion, cette aide, qu’il nous proposait ne cessait de diminuer jusqu’à disparaitre complètement. Depuis, nous payons de notre poche les frais de nos déplacements.

Monsieur Idir Djouder avance aussi une information susceptible de remettre en cause l’indépendance politique du GPK. Il affirme que le financement du GPK provient du Maroc. Sur ce point, on a observé un silence gêné à la fois chez le porte-parole du GPK et dans le communiqué du Mak-Kabylie qui se voulaient pourtant des réponses aux accusations de Djouder. Sachant qu’aucune organisation politique ne vit des cotisations de ses militants et des dons de ses sympathisants, aucune explication convaincante n’a été apportée. Pouvez-vous nous dire l’origine des financements du GPK, – 250.000€ mensuel – puisque maintenant la question est sur la place publique et qu’une voix aussi autorisée et informée que celle du ministre des Finances du GPK donne le Maroc pour source ?

Les deux communiqués que vous venez de citer ne peuvent être plus clairs. Chacun dans son domaine de compétence, ils condamnent ces allégations sans équivoque. L’argent du GPK, comme vient de l’affirmer monsieur le président de l’Anavad, provient des cotisations et aides de nos vaillants militants. Je connais des femmes et des hommes, ici en Allemagne et d’ailleurs, qui nous aident de manière conséquente, c’est-à-dire avec des dons de 5.000 euros et plus. Ceci dit, affirmer que le GPK reçoit 250.000€ par mois du Maroc est grotesque. À multiplier cette somme par quatre mois, le président de l’Anavad aurait donc reçu un million d’euros en quatre mois. Ah si c’était vrai ! !

Soyons sérieux ! Mais avant, j’aimerais préciser ma pensée, la mienne bien sûr, par rapport à cette question d’argent. Si je rencontre un diable, avec des cornes et des yeux rouge vif, qui me proposerait, sans contrepartie, de l’argent pour faire avancer le combat de la Kabylie vers sa liberté, je l’accepterais sans hésitation.

Pourquoi ménager un pouvoir qui a planifié et mis en œuvre une stratégie visant à nous faire disparaitre de la surface de la terre ? Pourquoi refuser une telle aide, parce qu’elle provient d’un pays en dissonance avec l’Algérie ?

L’Algérie, comme vous le savez, est gouvernée par des militaires qui n’ont aucun respect pour les peuples qui aspirent à la liberté. Le régime algérien est, de nature, méprisant, réactionnaire et violent. Même au-delà de son territoire, devenu une prison à ciel ouvert que les Algériens tentent de fuir en se jetant à la mer, il traque la liberté. Les généraux algériens ne viennent-ils pas d’affréter des avions de transport de troupes au tyran libyen pour acheminer en Libye des mercenaires qui, en ce moment même, sont entrain de massacrer le peuple libyen en quête de sa liberté ?

Craignez-vous suite aux révélations de Djouder un contrôle fiscal ?

Non. On n’a rien à se reprocher.

Le GPK brosse un portrait peu flatteur de Djouder, pourtant cheville ouvrière de la création de ce même GPK et très proche collaborateur de Ferhat Mehenni qui l’a nommé ministre des Finances. On est surpris par cette volte-face, si ce personnage, connu de tous et en particulier de Ferhat Mehenni, est la personne détestable qu’on nous présente aujourd’hui pourquoi en avoir fait le ministre des Finances du GPK ?

Détestable ? C’est vous qui le dites. Il aurait fallu savoir à l’avance que ce personnage connu de tous, comme vous dites, commettrait ce qu’il a commis. Par ailleurs, le GPK n’a pas encore fait de communiqué. La réaction à laquelle vous faites allusion est celle du MAK.

Ferhat Mehenni a longtemps expliqué son absence de la Kabylie par l’existence d’un mandat d’amener lancé contre lui. Confirmez-vous la réalité de ce mandat ?

Bien sûr que son absence de la Kabylie est due aux menaces réelles qui pèsent sur lui. La voix du MAK et de l’Anavad est une voix qui fait peur au pouvoir algérien. C’est une voix qui émane des tripes d’un peuple meurtri. C’est une voix qui s’élève des profondeurs de notre mémoire. C’est une voix juste. Elle est identique à celles de Laimeche, Benai Ouali, Abbane Ramdane, Amirouche Aït Hammouda, Krim Belkacen, Lounes Matoub, Hocine Aït Ahmed, Saïd Sadi, etc. Le MAK fait peur aux tyrans d’Alger car le temps les a rattrapés. Avec cette revendication autonomiste le pouvoir se retrouve devant ses propres contradictions. Plus, il ne dispose d’aucune marge de manœuvre lui permettant de manœuvrer puis de torpiller, comme il est habitué à le faire. C’est précisément ici, qu’il faut chercher les dessous de cette affaire. Quant à l’existence physique d’un papier sur lequel serait écrit « mandat d’amener », il peut se fabriquer, au besoin, sur le champ.

Dans l’affirmative pouvez-vous nous donner la teneur de ce document en précisant l’instance qui l’a émis, sa date et le motif, et s’il existe pourquoi ne l’avoir pas mis en ligne ce qui aurait coupé court à toute spéculation sur ce sujet ?

L’instance émettrice du document : C’est celle qui a assassiné Matoub Lounes en 1998. C’est celle qui a ôté la vie à 127 des nôtres en fleur de l’âge en 2001/2002.C’est celle qui a étranglé Abbane Ramdane à Tetouan au Maroc. Sa date d’émission : Depuis 1949. Son motif : Un anti-kabylisme viscéral. Il est en ligne depuis que l’internet existe. Les mauvaises langues peuvent continuer à discourir. On dit que de tout temps, il existe ce qui font l’histoire et ceux qui ont besoin de lunette pour la lire.

Soyons sérieux ! Ne perdons pas notre temps à chercher une quelconque preuve dans les archives d’un pouvoir capable des pires forfaitures. Rappelons-nous la séquestration de la dépouille du colonel Amirouche. N’était-elle pas enfouie dans l’enceinte même d’une caserne de gendarmerie nationale ? N’y aurait-il de preuve pour cette menace que l’incarcération ou l’enterrement de M. Ferhat Mehenni ?

Nous gagnerions beaucoup à respecter nos femmes et de nos hommes qui, sans attendre des jours moins agités, prennent des risques considérables et consacrent toute leur énergie à concrétiser la démocratie et la liberté du peuple kabyle. Sans attendre des lendemains meilleurs, ils donnent tout maintenant. C’est sans doute aussi ce courage qui a fait dire à Albert Camus que : « la vraie générosité envers l’avenir, consiste à tout donner au présent ».

Lyazid Abid, ministre de la Communication du GPK, Munich, le 01.04.2011

Questions posées par Marie K.

Interview de Idir Djouder sur le financement du GPK :

Merci de respecter notre travail.